Photo : Michelangelo Pistoletto, Sphère de journaux, 1965. Collection Frac Bretagne © Hervé Beurel
A travers deux nouvelles expositions : Des mots et des choses et Collection. La composante Peintures, l’institution culturelle bretonne ouvre les portes de ses collections, animées par des univers et des sujets artistiques variés.
Constitué de plus de 5 000 d’objets d’art, le Fonds Régional d’Art Contemporain (FRAC) de Bretagne est indubitablement vaste et hétéroclite, comprenant des toiles, vidéos, sculptures, installations ou encore des tapisseries. Depuis mars dernier, une exposition rassemble une partie de ce large corpus selon des axes thématiques, façon innovante et inédite de permettre au spectateur de découvrir les acquisitions régionales. Le public est invité à s’attarder ou réfléchir sur diverses notions telles que le mot, la ville, le monochrome, la contrainte, la récupération ou encore l’œuvre hybride, entre peinture et dessin. La visite s’effectue dans les locaux du FRAC conçus par Odile Decq. Inaugurée en 2012, la structure massive offre de grands espaces d’exposition lumineux (jusqu’à 1000 m2), accessibles par un escalier de béton, véritable fil conducteur du parcours du spectateur. Le tout mis en scène dans un jeu de puits de lumière et de contrastes entre les divers matériaux (verre, béton, métal) et couleurs (rouge, noir, gris). Un écrin de choix.
Des mots et des choses
Réalisée dans le cadre de la Biennale Exemplaires – Formes et Pratiques de l’édition et avec la collaboration de l’École Européenne Supérieure d’Art de Bretagne, cette première exposition montre les divers questionnements suscités dans la sphère artistique par de la place du mot, de l’écrit et plus largement du livre. Cette problématique récurrente interroge tout comme inspire depuis le siècle dernier, s’improvisant tantôt comme support, motif ou encore matière de laquelle s’affranchir. Le public est invité à suivre une succession de vitrines – véritable “colonne vertébrale” de l’exposition selon la directrice du FRAC Catherine Elkar – le long desquels il retrace l’histoire du livre d’artiste avec les figures de référence Ed Ruscha et Dieter Roth, le mouvement contemporain Fluxus ainsi que le travail récent du britannique Jonathan Monk.
Collection. La composante Peintures
La salle consacrée au thème de la ville présente de grands formats impressionnants exposés pour l’occasion sur un papier-peint coloré et graphique de l’artiste Yves Bélorgey. Ces œuvres, qui dévoilent les droites, les perspectives et lignes de fuites des grands ensembles HLM massifs de Marseille, Barcelone ou Brest, sont mises en regard des barres d’immeubles du quartier de Maurepas, édifiées dans les années 1970 et visibles par les baies vitrées de l’espace d’exposition. Se créé alors un jeu de questions-réponses entre œuvres exposées, qui révèle les formes architecturales de notre quotidien tout en les intégrant à l’œuvre d’art.
Les dernières salles, situées à l’étage de la structure, sont consacrées à un ensemble d’œuvres hétérogènes, avec une identité individuelle forte mais qui ne sont pas sans lien avec les travaux exposés dans les salles précédentes. On peut ainsi citer Vony, une toile sur laquelle Bernard Frize a répandu de la peinture extrêmement diluée et qu’il a ensuite retournée avant le séchage, rendant la confection presque naturelle par les coulures d’un paysage montagneux. Ce procédé brise la barrière d’un « sens » classique et défini de l’œuvre, puisqu’il n’y en a plus de bon. Tout comme les toiles indépendantes ne répondant à aucune organisation précise de Guillaume Pinard. De fait, ces petits tableaux figuratifs aux sujets simples et parfois énigmatiques (montagne, route, plage, enfant…) sont agencés entre eux de manière aléatoire par le commissaire d’exposition, ce qui autorise le public a créer de toutes pièces sa propre histoire et ses propres schémas narratifs pour relier les toiles entre elles et leur trouver (éventuellement) un sens.
De même, La Part des Anges conçue par Esther Ferrer est un travail chimérique, entre installation et performance. L’œuvre quasi vivante est constituée de verres remplis d’alcools dans lesquels baignent des fils de couture suspendus au plafond. Leur coloration progressive se fait ainsi petit à petit et l’œuvre se meut de la sorte par ses propres moyens.
Une exposition qui convainc par son approche thématique stimulante et offre l’opportunité de découvrir plus amplement le patrimoine régional contemporain si riche et si rarement visible.
Des mots et des choses et Collection. La composante Peintures. Jusqu’au 26 mai 2019 au FRAC Bretagne (19 avenue André Mussat à Rennes). Du mardi au dimanche de 12 h à 19 h .