Avec son héroïne cyborg authentique et inoubliable, tant pour sa sensibilité que pour sa combativité, Alita Battle Angel réalise des prouesses du point de vue visuel. Un univers généreux et une immersion totale pour une adaptation réussie !
Adapté de Gunnm, une des bibles cultes du manga créée et dessinée par Yukito Kishiro en 1990, Alita Battle Angel, de son sobriquet américain, se veut être une version cinématographique de l’œuvre d’origine. L’accent est mis sur la reconstitution assez fidèle du premier arc du manga.
Au XXVIème siècle, Ido, un scientifique, retrouve dans les débris de la décharge de Iron City sous forme de corps cybernétique désarticulé une jeune fille (Gally dans le manga). Son cerveau est miraculeusement intact. Reconstruite, cette dernière va tenter de découvrir ses origines, elle qui est tombée de Zalem, la fascinante cité céleste.
UL’univers dépeint dans le film réalisé par Robert Rodriguez et chaperonné par James Cameron est ahurissant. Les rues grouillent de vie, le métal rouillé ou chatoyant se trouve sur les murs mais aussi plaqué sur les corps en mouvement. Le cyberpunk transhumaniste imaginé par Yukito Kishiro impose sa légitimité. Un bond en avant est réalisé pour le rendu visuel des corps. Que ce soit Zapan et son physique intimidant déshumanisé ou Alita et son visage surréaliste – tout est pensé pour nous transporter dans un monde où les apparences sont trompeuses. Mention spéciale aux matchs de motorball exaltants !
Un matériau de base respecté
Les adaptations de monuments cultes de la pop-culture ont toujours été sensibles à mettre à l’écran. Après un Ghost in the shell en demi-teinte, la petite Alita branche les connexions de la forme polie et du fond philosophique avec brio. Le film réussit à retranscrire les émois de notre cyborg adorée avec des détails stupéfiants. L’équilibre délicat entre naïveté enfantine et maturité arrogante du personnage au sein d’un monde crépusculaire rappelle sans détour le matériau de base.
Marketing oblige, le long-métrage semble garder sous le coude une éventuelle suite pour ne pas encombrer ce premier jet. Les fans regretteront une mise en scène bien moins viscérale. Les pérégrinations de l’héroïne sont agrémentées d’une violence graphique atténuée, notamment par le sang des augmentés coloré en bleu, ainsi que par les démembrements rarement exposés à l’œil durablement. La richesse de l’univers, elle, reste effleurée tant la profondeur philosophique est réservée aux tomes plus avancés du manga.
L’ange métallique au cœur d’or
Alita Battle Angel est porté par son héroïne rafraîchissante et vaillante. Incarnée par une Rosa Salazar très impliquée, ses mimiques soutenues par deux grands yeux ronds attendrissent et surprennent par leur réalisme. La dichotomie entre son apprentissage enfantin et l’ancienneté de ses origines en fait un personnage profond et rare. Amoureux des femmes fortes, les japonais retrouveront ici une de leurs plus grandes égéries fictives.
Version plus exubérante et cathartique d’un major Kusanagi dans Ghost in the shell, Alita représente la fougue de la jeunesse. À la fois ange et bourreau, cette machine de guerre au visage de poupée – malgré une déshumanisation et une désexualisation du fait de son corps cybernétique intégral – nous fascine par son humanité touchante. Sa volonté est tournée vers la découverte de la vie, de ses origines, et la confrontation avec le danger. Il n’est finalement pas question ici du concept de Descartes mais de celui de Sartre : Alita est bien humaine, mais elle a besoin d’exister pour se définir.
Malgré un ton édulcoré par rapport au matériau de base, cette adaptation s’en sort avec les honneurs. Nous nous surprenons à vouloir affronter la vie aux côtés d’Alita en tant qu’ami, parent, ou amant. Avec un casting soigné et une équipe passionnée, Alita Battle Angel peut se targuer d’avoir façonné une création aux connexions stables et à la carapace solide.