SOCIÉTÉ

Une vision du gouvernement contre l’homophobie

Face au regain des agressions homophobes, le gouvernement s’est engagé sur plusieurs mesures au moment du débat sur l’ouverture de la PMA aux femmes homosexuelles. Parallèlement, le gouvernement a annoncé retarder les discussions sur ce débat pour mai 2019.

Nous nous sommes peu à peu habitués aux photographies d’hommes ou de femmes qui se sont fait agresser sur les réseaux sociaux. Certains n’ont subi qu’une agression verbale, d’autres ont eu des côtes brisées et d’autres encore n’osent pas en parler. Quelque soit la nature de ces agressions, elles ont tous eu le même résultat : l’angoisse d’en subir une nouvelle en raison d’une orientation sexuelle.

Ces agressions ne semblent plus s’arrêter depuis ces derniers mois, créant ainsi un climat angoissant pour de nombreuses personnes LGBT+. Selon SOShomophobie, une hausse de 37 % des agressions à caractère homophobe a été observée en septembre 2018 en comparaison à la même période de l’année précédente.

« PMA, l’égalité n’attend pas » ?

Cette phrase étendard de SOShomophobie semble avoir néanmoins un effet paradoxal, puisque pour comprendre ce regain d’agressions homophobes, il suffit de se promener au cœur des villes. Chaque jour nous marchons sur des petits tags blancs, parfois difficilement perceptibles à cause du nombre de personnes qui les piétinent, où nous pouvons distinguer si nous nous penchons bien « PMA sans père, une douleur sans fin ». Ces tags de la « Manif pour tous » fleurissent dans les espaces publics depuis plusieurs mois sans que ceux-ci soient occultés par les agents publics.

Le débat portant sur la PMA aux couples de femmes de même sexe et aux femmes seules, n’a donc eu pour seul effet cette hausse d’agressions alors que les revendications pour l’ouverture de la PMA ne cherchaient qu’un peu plus d’égalité au sein de la société.

Des divisions au sein de l’union

Un collectif d’associations LGBT+ s’étaient donc réunis le dimanche 21 octobre Place de la République pour dénoncer cette hausse d’agressions homophobes. Cet événement avait plusieurs objectifs : soutenir les victimes qui se terrent dans le silence, inscrire ce sujet dans le débat public et invoquer le gouvernement pour pouvoir bénéficier d’actions publiques.

Pour autant, ce débat n’apporte que des divisions au sein des associations LGBT+. Cette manifestation qui devait apporter l’union a apporté la désunion au moment où des membres d’Act Up, association militante de lutte contre le sida, se sont brièvement faits remarquer pour arguer « SOShomophobie, l’InterLGBT, LGBT+ En Marche, Flag ! et GayLib sont des instruments de collaboration consentants de cette mascarade […] et ne produisent rien pour les communautés, si ce n’est qu’un entre-soi rétréci et convenu, renforçant les stéréotypes ».

Un débat public timide

C’est donc discrètement que le gouvernement réagit suite aux révélations de l’agression de Romain à Rouen, séquestré et frappé le 25 octobre. Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, Nicole Belloubet, ministre de la Justice et Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat chargée de la lutte contre les discriminations, se sont réunis le 30 octobre dans les locaux de SOShomophobie en promettant des mesures comme le doublement des effectifs contre les agressions homophobes.

Cette réunion illustre le dialogue possible entre les associations de lutte contre l’homophobie et le gouvernement. A la suite de cette réunion, le ministre de l’Intérieur déclare « inacceptable » cette hausse de 15 % des agressions homophobes. Cette réunion en présence de deux ministres et d’une secrétaire d’État pour une association a donc pour dessein de montrer l’importance de l’enjeu qui se dessine sur l’homophobie.

Un bilan « positivement » relatif

Si le ministère de l’Intérieur avance une hausse de 15 % d’actes homophobes par rapport en 2017, les chiffres obtenus ne sont que les chiffres des commissariats de police qui enregistrent les plaintes. Il semble toutefois responsable de se poser la question de la légitimité de ces chiffres qui peuvent être bien plus importants comptes tenus des victimes n’osant pas aller porter plainte de risque de se faire « outer » ou vilipender par les forces de l’ordre, dû au fait que les institutions publiques ne bénéficient pas de formation contre les discriminations sur l’orientation sexuelle.

Si les associations de lutte contre l’homophobie organisent de nombreuses actions de préventions au sein d’institutions publiques, d’entreprises privées ou d’écoles, leurs moyens ne leur permettent pas d’être sur tous les fronts. Envisager une lutte contre l’homophobie efficace ne peut pas être le rôle des associations LGBT+, selon eux, mais de la République elle-même qui a promis trois principes dans ses fondements originels, qui peut agir par des formations et en augmentant le budget consacré à la lutte contre homophobie.

Une nouvelle position du gouvernement

Un mois après ces discussions, l’écho de ce débat semble s’être dissipé sur l’espace public, mais le gouvernement semble avoir pris en considération les revendications de certaines associations de lutte contre l’homophobie. La ministre de la Justice envisage donc la possibilité de pouvoir porter plainte en ligne, afin de faciliter la procédure pour les victimes qui ne souhaitent pas toujours aller au commissariat. Quant au ministre de l’Intérieur, il a promis d’augmenter le nombre de référents LGBT+ au sein des commissariats et d’augmenter les effectifs pour bloquer les sites haineux sur cette question.

Néanmoins, face à cette position conciliante, le gouvernement vient d’annoncer qu’il n’a pas prévu de relancer le débat sur la PMA avant mai 2019. Ce débat latent serait pourtant la cause de cette hausse de l’homophobie sans précédent depuis le débat sur le « mariage pour tous  », desservant paradoxalement ses engagements entrepris ces dernières semaines.

 

 

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