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Rencontre avec Moodoïd – “Faire de la fiction je vois ça comme une finalité”

Avant son passage au Cargö à Caen le 20 avril dernier, on a rencontré Pablo Padovani, l’initiateur de Moodoïd.

Il nous parle de la tournée, de son album Cité Champagne, qui sortira le 8 juin prochain, du cinéma des années 80, et de la dynamique évolutive de Moodoïd. Une formation qui demeure l’un des projets les plus réjouissants et excitants du paysage musical français actuel.

Comment se déroule la tournée Ricard S.A Live avec Isaac Delusion et MNNQS pour Moodoïd ?

C’est trop bien car cela nous permet de tester notre spectacle dans de bonnes salles, dans de bonnes conditions. Car on est quand même six musiciens sur scène ça fait beaucoup d’instruments, tout est joué en direct. C’est bien de se préparer au retour sur scène dans ces conditions là. On a plus l’habitude de jouer dans des structures très différentes généralement, dans des clubs, des scènes moyennes, ou sinon lors de festivals l’été !

Quels rendez-vous nous réserve Moodoïd pour cet été ?

On a quelques dates qui vont arriver mais qui ne sont pas encore annoncées pour le moment ! Il y aura la Days Off avec Paris avec Flavien Berger début juillet, mais aussi la Magnifique Society à Reims en juin. On aura pas mal de petits trucs comme ça !

Vous êtes six sur scène pour cette tournée, tu travailles habituellement avec eux ou cela change de temps à autres ? 

En fait il y a le groupe officiel, et vu que je travaille avec des musiciens qui font beaucoup de choses, ils ont tous un million de projets de leur côté, ils sont un peu tous remplaçants. Ça arrive que ça change, j’ai essayé de prendre des personnes avec des personnalités marquées, qui soient différentes. Comme c’est de la musique live tout repose sur la personnalité des musiciens.

 

 

C’est un mécanisme qui fonctionne bien entre le personnage de Moodoïd et ces différentes composantes qui se greffent au groupe ? Toutes ces personnalités sont complémentaires ? 

C’est trop bien oui ! Et puis il y a toujours des filles sur scène, le chant est réparti entre les voix de femmes et d’hommes, y a un truc d’interprétation avec les personnages de filles et de garçons, c’est complémentaire.

Y a eu des changements assez forts dans l’équipe entre le premier et le second album ?

Oui ça a été assez radical, tu l’entends bien dans la musique ! Mais il y a quand même toujours du lien, car c’est moi qui chante. Je reconnais ma manière d’écrire la musique et je reconnais mes goûts. J’écoute de la musique très différente j’aime beaucoup le jazz, la funk, la musique électronique, j’ai aucun complexe de style, du coup le changement ne me choque pas du tout !

Par exemple pour David Bowie, chaque album avait un son très différent, c’était pas du tout les mêmes musiciens, la même veine musicale. C’est quelque chose qui a fait que j’ai été très séduit par cet artiste par exemple. C’est pour ça que j’ai vraiment envie que chaque album ce soit un son, un travail, une esthétique, comme dans le cinéma, un réalisateur ne va jamais avoir deux fois la même image, c’est important d’avoir son monde.

Une simple question : pour quelles raisons avoir choisi le nom “Moodoïd” ?

Ca vient du mot anglais “mood”, et quand j’ai choisi mon nom à l’époque j’avais d’autres groupes à coté et en fait ce qui m’a marqué c’est que j’ai commencé à écrire d’une autre manière la musique, je me suis mis à écrire les chansons par rapport à des émotions très précises des sensations, je voulais que ça donne un truc genre “l’émotion étrange”, en accord avec un feeling particulier. Et je mettais toujours des -oïdes à la fin des mots, bizarroïdes etc. C’est ça Moodoïd, c’est l’émotion bizarre !

Il y a une très forte identité visuelle chez Moodoïd, d’où te viens ce sens esthétique ?

Effectivement c’est très important pour moi, j’ai fait des études de cinéma auparavant. Je réalise les clips du groupe, mais aussi pour d’autres artistes comme Juliette Armanet récemment (Manque d’Amour et L’indien), ou encore Paradis (Recto Verso).

Ça me permet de développer une identité visuelle, un personnage de scène, c’est très important pour moi l’idée qu’un album doit être accompagné d’un univers particulier. J’ai envie que Moodoïd soit un projet qui évolue beaucoup, que chaque album soit dans une histoire, un délire particulier !

 

 

 

Qu’est devenu Moodoïd entre Le Monde Möö en 2014 et ton EP Reptile en 2017 ?

Ça a commencé juste après le premier album, j’ai réfléchi à tout ce que j’allais pouvoir faire après, j’ai découvert le Japon, la musique japonaise. J’ai découvert vraiment des groupes des années 80 aussi, comme Yellow Magic Orchestra ou Kraftwerk. Du coup pendant un an j’ai fait pleins de voyages. Je suis allé aux Etats-Unis, je suis allé au Cambodge, au Brésil, ça m’a beaucoup inspiré et je me suis rendu compte que je partais toujours en voyage dans des grandes villes. Donc j’avais envie que cet album soit un peu mon album urbain, celui du bruit, de l’effervescence.

C’est donc toutes ces influences mondialisées que l’on retrouvera sur ton prochain album ?

Oui l’album s’appelle Cité Champagne et il sortira le 8 juin ! On retrouvera dessus Reptile, Planète Tokyo, Miss Smith, qui sont déjà présents sur l’EP de septembre dernier. Tout l’album c’est un délire synthétique, plastique, une évolution de Moodoïd dans un paysage plus différent car le premier album était beaucoup plus axé sur la campagne, la nature.

Ça se ressent beaucoup dans ta musique justement, le dernier EP possède une matière beaucoup plus funk, c’est un style qui t’as beaucoup influencé ? 

Je suis influencé par beaucoup de genres, mais c’est Prince qui est véritablement un mentor pour moi. Après il y a d’autres trucs comme les Talking Heads par exemple. Mais je ne veux pas me limiter à tel ou tel style.

 

 

 

D’ailleurs tu fais partie avec d’autres noms bien connus de la scène française, comme Soko, Christine & The Queens ou encore Woodkid, des artistes qui ont repris les musiques d’Yves Simon pour l’album Génération Éperdue, qui va sortir le vendredi 27 avril,  mais quel est ton rapport à la variété française ? 

Avec la musique que je fais c’est sûr que je suis rapidement catalogué dans la catégorie variété française, même si la musique produite aujourd’hui est relativement hybride. Pourtant je n’ai pas de lien particulier avec la variété française, ça n’été pas trop mon truc à la base, mais j’ai découvert progressivement et il y a pas mal de trucs cools ! J’aime beaucoup Mylène Farmer ou Plastic Bertrand par exemple.

Tu as récemment sorti un EP de remixes de Reptile, tu as pas mal d’artistes sur cet EP qui ont retravaillé des morceaux déjà bien aboutis, ça s’est fait comment ?

Oui c’est vrai, au début j’avais fait une liste d’artistes qui me parlaient pas mal. Parmi eux il y avait Com Truise, ou Alan Braxe, ça s’est fait du coup. Avec Myd c’était plus informel du coup on se connaissait, c’était un échange j’en ai fait un pour lui et il en a fait un pour moi !

Côté production tu avais déjà travaillé avec Kevin Parker (Tame Impala), pour ton premier album, cette fois-ci tu as travaillé avec qui ? 

C’est encore Kevin Parker qui a participé à la production, sur Au pays des merveilles de Juliet. Là c’est Pierre Rousseau (Paradis) qui a produit l’album. David Wrench et Lex, deux mixeurs anglais ont également participé, ils ont travaillé avec Caribou, et beaucoup de groupes que j’aime beaucoup comme FKA Twigs aussi, des trucs un peu indie mais très produits.

 

 

Tu as fait des études de cinéma, y a-t-il des artistes, des cinéastes, qui t’inspirent particulièrement et qui participent à l’identité de Moodoïd aujourd’hui ?

Oui on voit bien qu’il y a une vibe très années 80 dans l’EP. Je me suis beaucoup inspiré du travail de Brian de Palma, c’est une idole absolue pour moi ! J’adore le cinéma américain des années 80 en fait. J’aime beaucoup le travail de Cronenberg, et je suis toujours aussi fan de David Lynch, évidemment. Les vieux films de Tim Burton également, c’est quelque chose qui m’a beaucoup influencé.

Le cinéma c’est quelque chose auquel tu comptes revenir par la suite ?

Oui je pense ! Après j’essaye juste d’être réaliste pour le moment, je me vois pas faire les deux choses en même temps, du cinéma et de la musique. En ce moment faire des clips et de la musique c’est quelque chose que je trouve super. Et en terme d’agenda, de timing, c’est envisageable. Ça prend un mois pour un clip environ, entre les concerts j’arrive à caler les tournages.

Mais la fiction oui ça demanderait beaucoup de temps, même pour un court métrage ça demanderait six mois non stop. Mais moi c’est ce qui me plairait, faire de la fiction. Je vois ça comme une finalité. Enfin je me vois assez mal faire des concerts quand j’aurais 40 ans, je m’imagine rarement dans le futur,  mais je me vois plutôt avec une casquette sur un plateau de tournage !

Des choses à ajouter ? 

Je suis juste trop content de l’album qui va sortir, j’ai mis deux ans et demi pour le faire et c’est vrai que là je suis assez impatient que ça sorte au mois de juin. Je suis aussi trop content des concerts, là c’est le cinquième et avec le groupe c’est trop bien !


Il ne nous reste plus qu’à patienter jusqu’à la sortie de Cité Champagne, l’album tant attendu pour juin. En attendant la tournée Ricard S.A Live se poursuit jusqu’au 5 mai prochain, à Grenoble, Lyon, Poitiers, Toulouse et Montpellier.

 

Du cinéma et de la musique - Master Métiers de la Culture

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