Michel Hazanavicius aime les défis. Il fallait un certain cran pour réaliser un film sur Jean-Luc Godard, le patron de la Nouvelle Vague, considéré comme un dieu vivant du cinéma. En compétition, Le Redoutable est une comédie cinéphile qui nous fait en même temps détester et aimer JLG. Un film bien écrit mais qui repose principalement sur le jeu incroyable de Louis Garrel.
Pour lui rendre hommage, le cinéaste imite le style Godard : voix off, regard face caméra, slogan, etc. Le film est raconté par sa jeune épouse Anne Wiazemsky (Stacy Martin) qui joue dans La Chinoise. À travers, leur relation de couple, Michel Hazanavicius nous montre un Jean-Luc Godard en pleine crise existencielle, qui après le fiasco de La Chinoise ne pense qu’à faire la révolution. De manifestations de mai 68 à coups de lunettes cassées, et de répliques chocs, le cinéaste renie tous ses succès de Pierrot Le Fou au Mépris. Le mépris un mot qui caractérise bien le personnage qui n’hésite pas à dire un peu trop ce qu’il pense quitte à se brouiller avec ses admirat•eur•rice•s, ses ami•e•s et sa femme. On relèvera de ce film essentiellement les clins d’oeil faits au cinéma de la Nouvelle Vague qui ne peuvent que ravir les cinéphiles averti•e•s. Mais aussi la manière dont le réalisateur joue avec nous grâce aux mots qui sort de la bouche de JLG.
Révélation Garrel
Ce 70e Festival de Cannes semble nous révéler un autre Louis Garrel. Déjà méconnaissable à l’affiche du film d’ouverture, Les Fantômes d’Ismaël d’Arnaud Desplechin, il étonne encore plus dans Le Redoutable. Jusqu’ici, Louis Garrel nous avait toujours habitué à des rôles plutôt semblables, un parisien mélancolique, une sorte de copie de l’ Antoine Doinel de Truffaut. Métamorphosé en Godard avec un cheveu sur la langue, le comédien est étonnant. Il développe un potentiel comique qu’on ne lui connaissait pas et ça fonctionne parfaitement puisqu’il explose ainsi l’écran. Mais la sensuelle Stacy Martin, que l’on avait déjà remarqué dans Nymphomaniac de Lars Von Trier, ne passe pas non plus inaperçue. Un beau duo de comédien•ne•s qui se fondent bien dans les couleurs pop de Godard.
Mais même si on rigole beaucoup et que les dialogues sont pertinents, le scénario peine parfois à sortir la tête de l’eau. Le Redoutable n’est pas vraiment à la hauteur face aux autres films en compétition. Michel Hazanavicius a en réalité plutôt réalisé une sorte de parenthèse comique et cinéphile qui fait du bien au milieu de l’agitation cannoise.