Plongés dans le flou de l’ivresse d’une soirée automnale, perdus dans la découverte d’un nouveau festival, M pour Montréal, nous avons assisté au concert montréalais de Loud Lary Ajust, mieux connu sous l’abréviation LLA. Rythmé par un flow franglais à l’addiction enivrante, le show a transporté un public réceptif, à l’agitation transite et à la voix mobilisée pour chanter, si ce n’est crier, les couplets et les refrains. Transportés et déjà conquis, c’est avec plaisir et curiosité que nous avons rencontré Simon ou Loud et Laurent aka Lary.
On ne peut pas dire que Loud Lary Ajust est connu en Europe … Plutôt que de me référer à une page Wikipédia, je préfère vous poser des questions de “base”. Vous êtes Montréalais tous les deux mais en quelle année vous êtes-vous formés ?
Simon & Laurent : En 2011 !
Et vous faisiez quoi avant 2011, de la musique ?
Laurent : Ouais, enfin lui et moi on faisait déjà de la musique ensemble depuis qu’on avait comme 14 ans et on a rencontré Ajust par la suite.
Simon : Ajust qui est comme le producteur, celui qui fait la musique.
14 ans, ça fait une dizaine d’années que vous travaillez ensemble ça veut dire ? Vos âges on les retient, il faut dire que vous les rappez quand même souvent …
Laurent : Oui, ça fait 12-13 ans. Ah ouais, tant que ça ? Quand on parle de la jeunesse ?
Simon : Tu sais quand tu dis “J’ai 26 ans …”
Laurent : Ah ouais, peut être ! Ça m’arrive (rire)
Et le nom de Loud Lary Ajust ça vient d’où ?
Simon : C’est très simple, ce sont nos noms en solo, lui c’était Lary Kid, moi Loud Mad et Ajust Ajustice. Le trio c’est vraiment nos trois noms.
Vous êtes donc un groupe montréalais qui chante en franglais, pourriez vous expliquer le concept à un public européen ?
Simon : Ici c’est assez commun, quoi pas commun, mais ça existe depuis longtemps. C’est un peu un créole montréalais de mélanger l’anglais et le français.
Laurent : Mais c’est quand même strictement artistique dans le sens où les gens ne conversent pas dans la vie de tous les jours en franglais nécessairement. Pas autant que ça laisse croire en tout cas.
Simon : Nous les francophones on ne va pas parler à quelqu’un qu’on ne connaît pas en franglais, c’est vraiment un petit luxe que les montréalais se payent entre amis, mixer les deux langues. Même si sinon c’est majoritairement francophone, on évolue dans une culture qui est affectée par l’anglais et Montréal est une ville bilingue. C’est juste naturel.
Et sinon, quelles sont vos influences ?
Simon : C’est assez large, et ça varie tout le temps. C’est comme un mélange de trucs plus classiques de notre jeunesse, de rap et vraiment de ce qui se fait en ce moment. Évidemment aux États-Unis beaucoup …
Laurent : Le rap c’est américain là !
Simon : Le rap c’est la source. On écoute beaucoup de rock aussi, et on écoutait beaucoup de punk quand on était jeune, ce genre de musique des années 1980.
Laurent : Ça ressort aussi beaucoup dans nos spectacles tout le côté des années punk et rock, de nos années punk et rock.
C’est pour ça qu’il y a une batteuse à vos côtés ?
Simon : Entre autres, c’est vrai qu’il y a Andrea Silver qui fait le drum. Puis il y a une guitare ! Mais oui, ça vient accentuer ce côté-là qui découle clairement du rock là. C’est vraiment plus une performance à haute intensité.

Blue Volvo, 2e album de LLA
Et vous, quand vous avez commencé la musique ensemble ça a toujours été du rap ?
Simon : Ouais …
Laurent : On a enregistré quelques pistes de guitare piano là des fois, mais …
Simon : … rien de notable, non.
Il y a quand même des thèmes récurrents dans vos lyrics : la jeunesse … Qui est-ce qui écrit les textes ?
Laurent : On écrit chacun nos paroles respectives. Les refrains vont être écrits à deux des fois. Sinon nos couplets c’est vraiment lui qui écrit les siens et moi les miens.
Et après vous voyez si ça colle et vous faites des ajustements ?
Laurent et Simon : Ça colle toujours !
Simon : Et puis si ça ne colle pas tout à fait, ça peut être intéressant aussi. Mais on s’en parle, puis on échange un peu autour de ce qu’on va faire et on s’arrange pour que ça fonctionne, mais en général ça va un peu de soi, sans qu’on insiste.
Laurent : Les trois gars qu’on est dans le groupe, on perçoit les trucs de la même façon fait qu’il n’y a pas besoin de beaucoup de briefing avant. La plupart du temps, nos trois trucs fonctionnent bien ensemble sans que l’on ait besoin d’avoir trop de discussions dessus.
Et Ajust fait les instrus avant, après, pendant ? Comment ça se passe ?
Simon : Il les fait toujours avant, en premier, puis nous on écrit dessus. Ensuite, il les retravaille avec Rough Sound, qui est un autre de nos collaborateurs et qui fait des arrangements sur toutes nos chansons.
Vous avez des clips travaillés, on pourrait évoquer celui d’Automne notamment, en collaboration avec Karim Ouellet. Vous avez un intérêt particulier dans le développement d’un visuel ?
Laurent : On a un intérêt pour l’art donc très certainement. On a un souci esthétique, ça doit se jouer là dedans. Ça fait partie de l’emballage !
Simon : La mode, le visuel, les photos, ce sont tous des intérêts connectés …
Laurent : … connectés à la réalité de la musique aujourd’hui ! Il te faut un visuel fort ! C’est plus juste au niveau auditif que ça se passe à mon avis.
Ce que l’on voit notamment avec les derniers clips de Kendrick Lamar, comme Alright …
Laurent : Exactement, ce sont des courts métrages presque ! ! Le message sous-jacent de Alright est vraiment fort !
Vous rentrez dans des personnages pour LLA, en vous dissociant de votre musique dans la vie de tous les jours ou finalement une part de vous-mêmes est toujours dans le groupe ?
Simon : On ne quitte jamais complètement nos personnages. On ne peut s’en dissocier totalement parce qu’au final c’est quand même assez proche de qui on est. Parfois, c’est même exactement ce que l’on dit et ce que l’on vit.
Laurent : C’est de la réalité augmentée. Ça reste dans le fond vrai et trop important pour que l’on s’en détache complètement ! C’est sûr que le dimanche quand je fais mon épicerie j’y pense pas là, mais sinon je suis toujours un peu dedans.
Vous collaborez beaucoup avec des artistes montréalais ? D’ailleurs, est-ce qu’il y a une grosse scène hip-hop à Montréal ?
Simon : On ne collabore pas avec beaucoup d’artistes. Dans la plupart de nos albums on n’a aucun ou très peu de featurings, mais des artistes montréalais dans le rap il y en a quand même quelques-uns avec qui on fait des spectacles, avec qui on fait des tournées, avec qui on échange. Est-ce que tu connais Eman et Vlooper ? C’est vraiment un truc à suivre ! Sinon, il y a Alaclair Ensemble ou Koriass avec qui on travaille aussi. Ce ne sont pas tous des artistes montréalais, mais ce sont tous des artistes du Québec.
D’ailleurs vous avez trois artistes québécois à conseiller, à faire découvrir ?
Laurent : Cœur de Pirate, Pierre Lapointe et Garou pis voilà (rires). Trois extraordinaires artistes !
Simon : Ah oui, Notre Dame de Paris …
Laurent : Non, pour vrai, Eman et Vlooper, Chocolat, Elliot Maginot.
Et des lieux où sortir, puisque le Salon Officiel a malheureusement mis la clef sous la porte …
Laurent : Ah oui, tu y allais ? Nous on était tout le temps, mais vraiment tout le temps là ! Ça a fermé, oui, c’est triste … Pour sortir, il y a le Ping Pong sur St Laurent / Bernard.
Simon : Il y a le Majestic dans un autre esprit que le Salon Officiel, c’est moi la débauche, mais c’est vraiment agréable.
Laurent : Il y a la buvette à Simone sur Parc aussi. Pas mal dans ce coin donc, Parc, St Laurent, Bernard !
Bon, et les projets pour la suite ? Il y a un single, 1 jour, qui est sorti il y a peu, il me semble.
Simon : Oui, on prépare un EP. Donc un album court de cinq chansons qui va sortir en début 2016 !
Vous ne jouez qu’au Canada, mais est-ce vous aimeriez aller jouer à l’étranger ?
Laurent : Oui ! S’il y a une demande on va y aller, mais on ne va pas essayer de percer un marché qui n’existe pas. Je crois personnellement qu’il y en a un. Si à Paris Travis Scott peut marcher nous aussi !
Simon : En France, le rap est une musique plus importante qu’au Québec qui plus est.
Laurent : Elle est plus reconnue en tout cas !
Simon : C’est la musique la plus écoutée au monde il me semble.
Finissons en beauté, Loud Lary Ajust en trois mots, en excluant ceux-là ?
Laurent : Liberté, Égalité, Fraternité.
Simon : Ce n’est pas à prendre sur le ton de l’humour. C’est plutôt parce qu’après ce qu’il s’est passé, c’est une pensée pour vous français.
Propos recueillis dans le cadre du festival M pour Montréal le 19 novembre 2015.





