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Le Slow Fashion, ou une tentative de révolutionner la mode

De façon familière la mode est envisagée comme le symbole d’une consommation outrancière, dommageable autant d’un point de vue humain qu’environnemental. Cependant depuis quelques temps, on peut observer un changement sensible, une volonté de métamorphose aussi bien de son image que de son système.
En effet, depuis plus de deux ans le Slow Fashion se développe et prend de l’ampleur. Décorticage d’un phénomène qui pourrait bien être une révolution.

Début 2013, H&M annonçait en grande pompe la création de sa collection Conscious. Issue de sa fondation du même nom, l’idée était et est toujours d’avoir des créations à base de vêtements recyclés, et aussi comportant des produits plus écologiques. Les bénéfices de ces collections sont ensuite reversés à des causes nobles servant au développement durable comme l’éducation, l’accès à l’eau potable, et le renforcement du statut économique des femmes. Pour l’occasion, la marque propose même de récupérer d’anciens vêtements en échange de bons d’achat, valables, bien sûr, dans ses magasins.

Si ce géant de l’industrie du textile veut se placer comme un exemple dans l’évolution du secteur, il semblerait tout de même que cela s’arrête à une simple démarche de changement d’image.

En effet, on constate que les composants issus du recyclage et/ou écologiques restent minoritaires dans les collections et la production est toujours majoritairement localisée dans des pays sous développés ou en voix de développement. De plus les bons d’achat si gracieusement proposés sont en fait valables à partir de 30 euros d’achat et surtout sont non-cumulables.
Malgré son initiative louable, H&M, avec ses 52 mini-collections par an, demeure dans une logique lucrative et de Fast Fashion.

L’idée d’une mode éthique n’est pas nouvelle : déjà au début des années 2000, Isabelle Quéhé, fondatrice de l’association Universal Love, organisait des marchés multi-ethniques et nomades à travers Paris. En 2004, elle lance le Fashion Ethical Show, qui sera repris en 2013 par des organisateurs à Berlin.

L’année 2013 reste alors à marquer d’une croix blanche dans l’évolution de l’industrie de la mode. En février 2013, la parution de l’enquête de la journaliste Elizabeth L. Cline intitulée Overdressed : the Shocking High Cost of Cheap Fashion, dénonce les dérives du « fast fashion » que ce soit humainement ou écologiquement parlant.

Et puis après les mots l’exemple concret : le 24 avril 2013, à Dhaka au Bangladesh, l’insalubre usine de Rana Plaza s’effondre sur ses employés, causant un lourd bilan humain.
Si ce terrible accident a éveillé certaines consciences, Cline parlait déjà de l’alternative du Slow Fashion dans son enquête.

Le « Slow Fashion » est un terme inventé en 2007 par le docteur Kate Fletcher du London College of Fashion. Dans son étude, Sustainable Fashion and Textiles : Design Journeys (2008), Fletcher explique que ce mouvement s’inscrit dans la Slow Culture, prônant la prise de conscience et de responsabilités de chacun dans notre consommation.

Il s’appuie sur la création d’une consommation du vêtement plus éthique. Les consommateurs se renseigneraient sur la provenance de leurs vêtements, les conditions dans lesquelles ces derniers sont produits, et leur composition, comment les entretenir à long terme et les recycler, etc. Le Slow Fashion serait aussi un facteur d’une expression personnelle par le vêtement plus forte, en permettant une production diversifiée de part ses tissus. Préférer la qualité à la quantité est le mot d’ordre.

Divers structures et événements se sont créés en s’inspirant de ce mouvement et en réponse aux évènements de Rana Plaza : il y a eu notamment la création du Fashion Revolution Day par la créatrice Carry Somers, qui a lieu chaque année au mois d’avril. Cette journée a pour but de porter ses vêtements retournés de façon à voir l’étiquette et donc la composition de ces derniers. Il faut ensuite faire un selfie que l’on partage sur les réseaux sociaux.

Cependant le docteur Fletcher insiste : le « Slow Fashion » est certes une solution, mais ne pourra pas tout régler, le Fast Fashion ayant encore une place trop importante pour les créateurs. Il ne peut que réduire que les impacts négatifs sur l’environnement.

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