Daesh en Irak et en Syrie, Boko Haram au Nigéria… Entre tous ces acronymes il est difficile de ne pas faire de confusion. Ces groupes terroristes, l’un au Moyen-Orient, l’autre en Afrique noire, sont similaires dans leurs actes. Cependant ils ne sont pas toujours liés dans leur organisation. La nouveauté est désormais que Boko Haram a décidé, le 7 mars 2015, de prêter allégeance à Daesh, encore connu sous le nom d’Etat Islamique. L’organisation EI, qui a confirmé cet accord, cherche à étendre son pouvoir afin de répandre la terreur parmi ceux qu’il considère comme mécréants. Cependant, les deux groupes djihadistes ne sont pas similaires. Leurs histoires et leurs organisations sont différentes. Comment se sont-ils formés ? Qu’est-ce qui est susceptible de changer après cette déclaration d’allégeance ?
Deux factions, un même but
Boko Haram est fondé en 2002. C’est d’abord une mosquée où se rendent de nombreux fidèles. Cette mosquée va par la suite se politiser : le groupe de Boko Haram se sectarise alors pour finir par constituer l’un des groupes terroristes menaçant le plus la paix mondiale. Le mouvement djihadiste salafiste du nord-est du Nigéria a le même objectif que Daesh : celui d’établir un califat et d’appliquer la charia.
Il y a donc une similitude idéologique dans l’idée du califat que brandissent les deux groupes. Daesh qui sévit en Irak et en Syrie cherche à établir une gouvernance islamique très organisée. Quand les militants de Daesh ont enlevé en masse des femmes Yézidis en Irak, il était fait référence dans leur communiqué aux enlèvements de Boko Haram, des lycéennes nigériennes notamment, en mai 2014.
Entre les deux groupes armés, il ne fait aucun doute que des circulations de matériel de guerre, des échanges d’argent ont eu lieu. Ils ne forment cependant pas une armée multinationale, malgré des liens forts établis.
L’allégeance de Boko Haram à Daesh : un royaume de la terreur
« Nous annonçons notre allégeance au calife des musulmans, Ibrahim ibn Awad ibn Ibrahim al-Husseini al-Qurashi », a déclaré dans un enregistrement audio poste sur Twitter Abubakar Shekau, chef de Boko Haram.
L’organisation de Boko Haram est beaucoup moins stricte que celle de Daesh et ses actions sont beaucoup plus éparses et spontanées. Le groupe nigérian opte pour les mêmes méthodes de propagande que Daesh. L’association s’opère depuis plusieurs mois déjà et cette alliance ne fait que le renforcer.
Pour un spécialiste de l’islam radical, Mathieu Guidère, ce rapprochement a plusieurs dangers : un alignement dans les méthodes de propagande, une meilleure visibilité, et un meilleur fonctionnement dans les actions entreprises. Cela permet notamment de rallier de nombreux combattants. Abu Bakr Al-Bagdadi enjoint donc aux musulmans ne pouvant pas rejoindre le groupe terroriste en Syrie de combattre en Afrique. Mais selon l’expert, bien que Daesh soit une organisation terroriste très riche, plus riche qu’Al Qaïda, les moyens financiers ne sont pas la raison pour laquelle Boko Haram rejoint Daesh. Cela serait donc plus pour une question d’image et de communication à travers le monde, et permettrait de recruter d’avantage.
Agir pour éviter le pire
Les membres du Conseil de Sécurité de l’ONU ont appelé à venir en aide au Nigeria en ravitaillant de l’argent, des troupes et des analystes pour aider à combattre ces groupes. Une résolution autorise l’utilisation de forces spéciales contre Boko Haram.
Boko Haram, qui a tué plus de 10 000 personnes l’an dernier, est considéré comme une des plus dangereuses menaces pour la paix et la sécurité dans le monde. L’expansion de Daesh sur des groupes tels que celui-ci inquiète davantage. L’enjeu est de canaliser et de combattre ces groupes. Mais bien souvent les forces des Nations Unies n’ont qu’un faible impact et ce sont les populations locales qui subissent le plus en prenant les armes pour éviter le pire, comme l’on a pu le constater lors de la libération de la ville de Kobané en Syrie, qui était alors sous l’emprise de l’organisation Etat Islamique. Cependant, au vu des divergences et des histoires différentes des deux factions, il n’y a pas encore d’internationale Djihadiste soudée, et ces groupes restent très solubles. Il est donc encore difficile d’évaluer l’impact de cette allégeance.