LES RÉTROSPECTIVES
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Si la communication du festival Lumière compte essentiellement sur les grandes séances et la présence d’une personnalité importante pour remplir les salles et attirer les foules, nous l’aimons plutôt loin des flashs et du fond de teint, dans ce qu’il a de plus beau : les rétrospectives. Oubliez tout vos fantasmes de machines à voyager dans le temps, posons les yeux sur la toile blanche.
Sur quelques films français, par Bertrand Tavernier
Habitué des lieux, Bertrand Tavernier nous offre cette année encore une sélection précieuse de films francais. Un panel éclectique passant de la comédie romantique au film policier, ces histoires aux saveurs passées nous entraînent dans un monde inconnu avec par exemple, le Paradis Perdu d’Abel Gance.
“Rêves d’amour, bonheur trop courts…” Un air musical, thème du film, donne le ton lyrique au chatoyant noir et blanc. Tout est précieux : soie et dentelles. Là-bas, les pauvres sont riches d’amour, heureux de vivre. Mais l’idylle se transforme en drame, la guerre à commencé et les hommes sont appelés.
Dans cette comédie, l’éclairage est hollywoodien et les acteurs trop beaux pour être vrais. Mais même aujourd’hui, près de 70 ans après la sortie du film, on y croit dur comme fer et dans les yeux de chaque spectateur opère la mythique magie du cinéma.
Directed by Frank Capra
Découvrir le cinéma de Franck Capra, réalisateur du cultissime La vie est belle, c’est un éclair de lucidité : ses films sont d’une actualité frappante.
Frank Capra, c’est un peu le Hollywood populaire. L’homme obstiné qui tourne ses idées coûte que coûte sans studio et avec des acteurs mécontents (New- York, Miami). Loin des classiques subterfuges, il n’utilisera pas les diamants et belles voitures pour nous faire rêver, non. Frank Capra, ce sera plutôt des carottes crues en déjeuner et un auto-stop aussi atypique qu’érotique. Au-delà du cinéma, ce sont manifestes.
Franck Capra ce sont des séances tordantes et des films distributeurs de sourires, des questions aussi : « Mais comment les américains ont-ils pu aimer ce film en 1936 alors qu’il est communiste ? » (L’extravagant Mr. Deeds). Après un léger mouvement de sourcils et un rembobinage express des images du film, l’impression se confirme : il n’y a jamais réellement de discours politique dans son cinéma mais une mise en scène d’actes dont la nature tend plus vers la solidarité et la justice que le communisme. Pas de classes sociales, pas de prolétariat, pas de bourgeois mais de l’humour et de l’amour, du charisme et de l’héroïsme – et pour cela, n’oublions pas les interprètes en or que capte Capra comme Gary Cooper, Jean Arthur, Clark Gable, Claudette Colbert.
Frank Capra s’engagera dans ses films sous couvert d’un humour sensuel aussi juste que mordant qui, des décennies plus tard, n’aura de cesse de nous convaincre.
Le temps de Claude Sautet (1960-1995)
Il n’est pas des plus anciens, il n’est pas des plus méconnus. Ce cinéaste, c’est Claude Sautet. Celui que l’on a qualifié de réalisateur commercial (énorme méprise d’ailleurs que de confondre l’envie du profit à celle de l’accessibilité d’un film) est mis à l’honneur au Festival Lumière. Ses plus grands succès (César et Rosalie, Les choses de la vie…) sont à nouveau sur le grand écran et c’est avec joie que nous découvrons cette esthétique floue aux teintes passées, ces personnages simples et francs. Chez Sautet, tout est délicat : de son scénario au jeu des acteurs, rien ne va être imposé. Il y a le génie de parvenir à une inimitable finesse intellectuelle tout en restant extrêmement accessible. Chacun va s’y distraire, rire et pleurer mais l’émotion que vous garderez sera le bucolique regret d’avoir quitté cet univers au charme fou. C’est cela qui fait la magie de Sautet, il touche tout le monde, en plein cœur.
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