« Démocratie ouverte » ou « Open Government » dans la langue de Shakespeare, qui a vu naître ce concept. Encore peu connue en France, ses promoteurs la voient comme une façon de régénérer le fonctionnement démocratique, en se basant sur la libération des données.
Outre-Manche, on l’appelle l’OpenGov ; en France, on parle de démocratie ouverte. Deux termes pour une même doctrine, basée sur trois valeurs cardinales : transparence des informations, participation citoyenne, collaboration entre gouvernants et gouvernés. Cette nouvelle vision du fonctionnement démocratique commence à essaimer un peu partout dans les pays développés, promettant un changement radical de la vie citoyenne. Mais qu’en est-il vraiment ?
Des gouvernements à la manœuvre
Le mouvement a été initié par les pays anglo-saxons, ressentant un fort désir de la part de la population d’accéder à des données publiques jusque là quasiment inaccessibles. Internet permet de répondre à cette aspiration à plus de transparence démocratique en permettant aux gouvernements de diffuser des informations dans des formats ouverts au public et librement réutilisables. Le Québec s’est particulièrement impliqué dans l’OpenGov, dans l’objectif d’améliorer de manière continue le fonctionnement des services de l’Etat. « Le gouvernement ouvert du Québec permet à la population de suivre l’évolution des échéanciers et des budgets alloués à certains projets », comme le proclame son site internet dédié au sujet.
Au-delà de l’Amérique, un partenariat global au service de la démocratie ouverte s’est mis en place : l’OGP, pour Open Government Partnership. Composé d’Organisations Non Gouvernementales (ONG) et de gouvernements, l’OGP vise à obtenir des engagements concrets des pays en matière de gouvernance ouverte et à permettre une évaluation indépendante de leur mise en œuvre. 58 pays ont pour le moment rejoint l’initiative, à l’exception notable d’un pays comme… la France !
La France à la traîne
En effet, l’Etat français traîne quelque peu des pieds à suivre le mouvement de l’OpenGov. Elle n’a que le statut d’observateur à l’OGP. La plate-forme Etalab a bien été lancée en 2011, regroupant de nombreuses données ouvertes sur l’Etat français. Mais elles représentent peu de choses par rapport à ce qu’a mis en place le Royaume-Uni ou le Québec. Ce qui semble manquer, c’est une véritable vision et une volonté politique autour de la démocratie ouverte. Ni le Président de la République, François Hollande, ni son Premier Ministre, Manuel Valls, n’ont prononcé un discours sur le sujet, qui semble encore assez mal appréhendé par les politiques de l’Hexagone.
Un mouvement de l’OpenGov tout de même bien présent
Malgré le retard de l’Etat, la société civile n’est pas en reste. Ainsi, des initiatives comme Open Date France émergent. Mêlant des collectivités locales d’importance comme la Communauté Urbaine de Bordeaux ou la Ville de Paris à des réseaux associatifs locaux, ce site a pour vocation d’agréger « la veille des partenaires, propose des espaces de restitution des groupes de travail établis et met à disposition des ressources communes ». Une veille Internet est opérée : y sont recensés toutes les pages parlant de l’OpenGov et de son corollaire, l’Open Data, la libération des données publiques. Une organisation en forme d’ateliers s’est aussi mise en place permettant de faire émerger le site internet actuel ou bien encore d’établir toute une série d’indicateurs, permettant de repérer de manière objective ce qui caractérise un projet Open Data.
En matière de veille, un autre acteur important de l’OpenGov en France est l’Open Knowledge Foundation (OKF), dont l’antenne française a vu le jour fin 2012. Son credo : considérer « qu’un accès libre aux informations associé aux outils et aux communautés pour les utiliser sont des éléments essentiels pour améliorer notre société ».
Une des dernières initiatives en date de l’OKF consiste à lancer la Base d’Adresses Nationale Ouverte (BANO). L’idée est de constituer le registre d’adresses le plus large qui soit au niveau hexagonal, alors qu’en France, dans ce domaine, l’information n’est toujours pas librement disponible. Elles servent surtout à déterminer un emplacement géographique et donc un lien géospatial à partir de données non-géographiques. Elles sont aussi essentielles pour l’intervention des secours, ce qui intéresse en particulier le SAMU, les pompiers ou bien encore la gendarmerie. Une des multiples initiatives qui font que le mouvement de l’OpenGov est très dynamique en France… alors que l’Etat est largement à la traîne !