SOCIÉTÉ

À quoi joue Mélenchon ?

Si l’homme est un animal politique, Jean-Luc Mélenchon est un sacré représentant de notre espèce. Le co-président du Parti de Gauche (PG) ne recule effectivement devant rien pour faire entendre sa voix. Tribun hors pair aux formules acerbes envers tous ses adversaires politiques, qui sont nombreux, Mélenchon est un personnage haut en couleurs, atypique même au sein du paysage politique français. Homme intelligent, précis sur ses dossiers, Mélenchon incarne une sorte d’honnêteté politique du fait de sa franchise. Il a aussi été le premier à alerter sur les dangers de la montée de l’extrême-droite, qu’il combat en permanence, notamment en se présentant contre Marine Le Pen à Hénin-Beaumont au moment des élections législatives. Certains le pensent nécessaire pour faire bouger les lignes à gauche, d’autres, notamment au PS et au gouvernement, le voient comme un trublion à la critique facile mais sur le fond, creux et démagogique.

Lui qui a fait 10,5 % lors de la dernière présidentielle, pense depuis lors qu’il est l’homme qui a fait gagner François Hollande. De fait, il se sent légitime lorsqu’il s’agit de critiquer la moindre mesure du gouvernement qui, pour lui, n’irait pas dans le bon sens. Autrement dit presque toutes. S’il fait l’unanimité à l’intérieur de son parti, le Parti de Gauche, ses partenaires du Front de Gauche et notamment le Parti Communiste (PCF) sont de plus en plus régulièrement agacés par le turbulent Mélenchon. Un exemple précis : les municipales. Le PCF est un allié historique du Parti Socialiste ; et dans certaines communes, les listes sont unitaires dès le premier tour. Le secrétaire général du PCF, Pierre Laurent, a pris le parti de dire que les alliances de premier tour devaient se faire au cas par cas, selon la situation locale. Mélenchon lui, par anti-Solférino primaire ou par calcul politicien, refuse toute alliance avec le PS dès le premier tour et réclame des listes Front de Gauche autonomes, ce qui soulève le mécontentement de certains militants communistes. Lors de la dernière fête de l’Humanité, beaucoup exprimaient leur ras-le-bol vis-à-vis de Mélenchon, qui se mêle en quelque sorte de ce qui ne le regarde pas, diabolisant le Parti Socialiste, “parti de traîtres”, écartant ainsi les spécificités locales.

La critique permanente, le rejet viscéral du Parti Socialiste duquel il a été membre pendant plus de vingt ans, ministre de Lionel Jospin, le non-respect parfois de ses partenaires sans qui il ne serait plus grand chose, tout cela ne sert pas vraiment Jean-Luc Mélenchon. Sentiment renforcé par ses lieutenants, que peuvent être Delapierre et Corbière, qui tentent de copier le maître en cherchant la petite formule, mais en restant toujours dans la critique et non dans la proposition. Observateurs, opposants, partenaires politiques : on se demande parfois où va Mélenchon, où est son projet politique, ce qui fait sa différence. Le danger pour lui désormais, c’est d’être illisible auprès de ses électeurs et d’envoyer le Front de Gauche dans le mur pour les prochaines échéances.

You may also like

More in SOCIÉTÉ