LITTÉRATURE

2012 et la littérature

      C’est une année plutôt déconcertante pour la scène littéraire, entre romans dont on espère qu’ils seront des chefs-d’oeuvres mais qui déçoivent, et récits inattendus qui surprennent ! Voici une sélection de réussites et d’échecs relevée par Maze.

 Les réussites de l’année :

On note premièrement le prix Nobel de Littérature attribué cette année au Chinois Mo Yan pour son oeuvre caractérisée par un ”réalisme hallucinatoire’‘, le hissant au rang d’héritier d’écrivains tels que Gabriel Garcia Marquez ou bien William Faulkner, maestros dans cet art. ”Mo Yan” signifie ”Ne pas dire”, et son roman-fleuve (800 pages), Beaux Seins, belles fesses, aura prouvé que ce silencieux criait littéralement contre le régime communiste Chinois, soulevant nombre de critiques.

Le prix littéraire français, Prix Apollinaire, a été remporté le 20 octobre dernier par la poétesse Valérie Rouzeau pour son recueil VROUZ, où elle propose des alexandrins à la versification extrêmement libre, sorte de laboratoire linguistique déjà si palpable dans le recueil Neige Rien. Le ton de la jeune femme, avec sa maturation, ne perd rien de sa justesse, et le nouveau langage qui émerge dans ce recueil semble être tout naturel sous sa plume. Une autre oeuvre poétique toute aussi admirable est celle d’Erri De Luca, auteur italien qui signe cette année son retour avec le recueil Aller simple et le roman Il dit. Pépite de la littérature moderne, son style, frôlant à toutes les lignes l’essence pure et simple des choses, est remarquable.

Un autre-roman fleuve mérite d’être cité : le dernier roman de Sylvie Taussig, Dans les plis sinueux des vieilles capitales, qui, à la façon de Balzac, explore Paris et les relations humaines, qui consigne, dans pas moins de 1752 pages, ”une comédie de moeurs à l’échelle d’une ville”, et qui fait aussi figure de bonne surprise pour les éditions Galaade. Maniant les mots avec une fluidité et une géométrie minutieuses, cette chercheuse du CNRS fait référence à Baudelaire avec le titre de son roman qui n’est autre qu’un vers du poème “Les petites vieilles“ ; ainsi l’élève salue le maître.

Attendu comme le prochain chef-d’oeuvre de JK. Rowling, Une place à prendre, roman policier faisant s’affronter des personnages un poil caricaturaux dans un paisible petit village anglais, signe le retour de la romancière et démontre qu’une fois la magie envolée, l’auteure parvient à s’illustrer dans le genre grâce à sa plume acérée et légère. Bien loin de la saga Harry Potter, l’intrigue peut éventuellement paraître fade aux inconditionnels de la sorcellerie, car elle ne s’éloigne pas de la réalité, mais la prise de risque de l’écrivain ne peut qu’être saluée !

Au rayon fantasy :  Le quatrième tome du cycle de l’Héritage, intitulé lui-même L’héritage, signe la fin des aventures bien connues d’Eragon. Culte pour les lecteurs de Fantasy, la fin ouverte de la saga du jeune écrivain Christopher Paolini laisse à penser qu’il pourrait y avoir un cinquième tome. Une chose semble certaine néanmoins, c’est qu’il n’y aura plus d’adaptations cinématographiques des romans, jugées trop onéreuses. Cela n’est heureusement pas le cas pour les adeptes de Bloodlines, série qui revient sur les écrans au moment des fêtes de fin d’année. Spin-off de Vampires Academy, on remarque une trame cependant moins riche en rebondissements, mais tout de même mémorable face au récit d’origine de Richelle Mead.

La marge au premier plan…

 Le premier de roman de Bill Clegg, Portrait d’un fumeur de crack en jeune homme, considéré comme une orgie suicidaire et relatant la rechute du narrateur dans l’alcoolisme et la drogue, laissait en haleine les lecteurs qui attendaient impatiemment la suite de ses aventures. Voici chose réglée avec 90 jours. Récit autobiographique  racontant la thérapie du narrateur, funambule marchant sur la corde raide du chemin de la guérison, ces 90 jours d’enfer et d’espoir sans drogues ni alcool explorent les limites de l’être humain en prise avec ses démons et venant à envisager la solution ultime. Espoir et désespoir ne cessent de s’y bousculer, mêlant suspense et prévisibilité. Grâce à son style limpide et réaliste, l’auteur en vient à susciter la sympathie et la compassion du lecteur, marque de la qualité de l’écriture.

L’avancée  littéraire majeure de l’année reste l’arrivée en kiosque du MAGAZINE LITTERAIRE qui apporte une nouvelle respiration à la littérature et se place en tête d’un domaine où tout reste à faire.

Les mauvais élèves de l’année :

  Les Menteuses de  Sara Sheppard

 Parce que les clichés jeunesse à l’américaine, c’est bien, mais que trop, c’est trop, et surtout parce qu’on entend déjà trop parler de Pretty Little Liars, la série télévisée adaptée de ces livres, et que neuf tomes, c’est quand même beaucoup, on dit stop…

Rivage Mortel  de  Carrie Ryan

Avec La Forêt des Damnés, ce roman post apocalyptique époustouflant, on s’attendait à une suite mouvementée et riche en rebondissements, et à voir les personnages du premier tome se mettre à la chasse aux zombies, à l’instar des personnages de la série The Walking Dead. Mais il n’en est rien, et l’écriture pourtant sans défauts de Carrie Ryan nous ramène au point de départ, en changeant de personnage principal, d’intrigue, et même les noms de certains repères de l’histoire. Dérangeant donc, et un peu décevant…

 

François Hollande Président : 400 jours dans les coulisses d’une victoire

 Sous la direction de Francois Ruet et avec les commentaires de Valérie Trierweiler, compagne de François Hollande, cet ouvrage imagé suit au fil des jours la transformation d’un homme qui se glisse progressivement dans la peau de président de la République. Des visites d’usines, des meetings, aux réconciliations avec les autres candidats à la présidence, en passant par la maison d’enfance du candidat, ce livre retrace photo après photo le parcours de François Hollande. Il est vrai que ce livre offre des images exclusives, intimes et inédites de  François Hollande et de sa campagne. Mais malgré tout, il ne s’est écoulé qu’à 1174 exemplaires !  Il s’agirait plus là d’un album photo que d’un livre, et chaque photo est presque surjouée par les figurants : du jeu de président normal au jeu d’acteur, il n’y a qu’un pas derrière l’objectif. Un si petit nombre d’exemplaires vendus serait-il le signe que le public s’est lassé de suivre leur vie ? Après tout, qui voudrait d’un autre album photo que le sien au coin de la cheminée ?

En somme, cette année littéraire voit les preneurs de risques récompensés, et ceux qui ne se soucient pas d’une  telle créativité, surfant sur la vague des clichés, exploitant des cadres trop usés et fatiguant les lecteurs, sanctionnés. Il reste à espérer que l’année 2013 s’ouvrira sur une nouvelle tendance.

Maître ès lettres. Passionnée par la littérature et les arts | m.roux@mazemag.fr

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